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Quand Demy adaptait un manga

22 Juin 2020 Publié dans #Cinéma, #Cinéma français, #Jacques Demy, #1970es, #Adaptation littéraire, #Manga, #Riyoko Ikeda

Lady Oscar (1978) de Jacques Demy (1931-1990)

Une vraie rareté que ce Lady Oscar... En ces années 1970, Demy a du mal à boucler ses différents projets et accepte une commande de producteurs japonais qui lui proposent d'adapter un manga très populaire au pays du soleil Levant : La Rose de Versailles de Riyoko Ikeda. Le film sera tourné en France avec un casting britannique. Il ne sortira qu'en Asie, n'étant qu'aléatoirement projeté dans quelques festivals européens.


Il est aisé de souligner les faiblesses du film : le caractère étonnant de ces dialogues anglais pour des personnages exclusivement français (sauf Marie-Antoinette et Fersen, évidemment), la faiblesse générale du casting, composé d'inconnus qui le sont restés (dont la très belle Catriona MacCall, dans le rôle titre), le recours aux clichés les plus éculés ou aux anachronismes les plus douteux (Louis XVI falot, Marie-Antoinette passionnée par ses moutons, et même un improbable Robespierre qui annonce la Révolution alors qu'il devait encore être au collège d'Arras à l'époque), le manque de moyens de la reconstitution de la prise de la Bastille (la forteresse apparaît comme une ombre et les Parisiens soulevés offrent le spectacle assez pathétique des figurants les moins convaincants de l'histoire des films en costumes). On est dans l'image d’Épinal de Versailles et de la Révolution, tels que se les figurent les Japonais.
Et pourtant, le film fonctionne... Demy n'était pas dupe de ces limites mais il a pu s'appuyer sur un scénario qui file à toute allure (il fallait bien résumer les milliers de pages du manga), et a su nous livrer de belles images des intérieurs XVIIIè avec ce mélange de réalisme et de fantaisie dans la reconstitution d'époque qui se donnaient déjà à voir dans Peau d’Âne ou Le joueur de flûte. Le thème même du travestissement (repris du Chevalier d'Eon ou de Mademoiselle de Maupin) comme des troubles sexuels et des attirances contre-nature ne pouvait en outre que séduire un réalisateur qui, comme d'autres de sa génération (Louis Malle notamment), n'a cessé d'explorer ces recoins de l'âme. On passe donc un bon moment à la vision de ce film mineur mais qui n'en est pas moins un vrai film d'auteur.

 

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