Dans les remous d'un Japon ambigu

Haut le cœur (1963) de Jun Takami  (1907-1965) 

Ce chef d'oeuvre de Jun Takami a fait l'objet d'éloges de Kawabata et de Mishima, quoiqu'il ressortisse à des problématiques et relève d'un style très éloignés de ces auteurs.
Le roman, qui se déroule de Tôkyô à Hokkaidô, de la Mandchourie à Shanghaï, offre un panorama saisissant des convulsions du Japon des années 1920. Notre héros est un anarchiste qui rêve d'actes terroristes tout en n'étant pas très éloigné du crime organisé. Il fréquente prostituées et bouges mais s'insère peu à peu dans les cercles militaristes qui œuvrent à l'établissement de la dictature et au renversement des gouvernements bourgeois. Son chemin l'amènera jusqu'en Chine pour y participer aux manœuvres qui vont déboucher sur la guerre sino-japonaise.
Le roman est assez affolant d'ambition et d'ampleur. Tableau étonnant des milieux criminels et militaristes, au style presque célinien dans son recours à l'argot et au langage parlé, il n'a guère d'équivalent dans la littérature japonaise. On croirait lire un roman russe - et un grand.